Maroc : Roadtrip autour de l’Atlas

Il y a des routes qui ne se tracent pas seulement sur une carte, mais qui s’inscrivent en vous. Le Maroc fut de celles-là. Une Dacia Logan de location comme fidèle monture, et la promesse d’un voyage où chaque virage ferait jaillir un monde nouveau : la frénésie de Marrakech, la profondeur de Fès, les kasbahs d’Ouarzazate, la verdure improbable de la vallée du Drâa, puis l’océan d’Essaouira, vaste et apaisant.

Le Maroc fait partie de ces pays qui se découvrent mieux derrière un volant, les fenêtres ouvertes sur le monde. Voyager en voiture ici, c’est accepter de se laisser surprendre à chaque tournant : une vallée qui s’ouvre, une lumière qui change, un village qui apparaît au loin.

Un voyage ici ne se mesure pas en nombre de jours, mais en intensité. L’itinéraire que j’ai suivi s’est égrainé sur deux semaines, assez pour goûter à la diversité du pays sans jamais en épuiser la richesse.

Marrakech, point de départ.

Marrakech est le seuil du voyage, un lieu où l’on laisse tomber ce que l’on croyait savoir pour entrer dans une autre respiration. Dans la médina, chaque ruelle est un passage secret, une énigme à déchiffrer entre les odeurs d’épices, le martèlement du cuivre, les couleurs saturées des étoffes.

Au crépuscule, la place Jemaa el-Fna devient un théâtre total. La fumée des stands de grillades monte dans l’air chaud, se mêlant aux cris des marchands et aux histoires des conteurs. On reste là, immobile, les sens bousculés, jusqu’à ce que la nuit engloutisse la ville et que les lanternes percent son obscurité.

Fès, la médina aux mille portes

Après la sortie de Marrakech, un peu chaotique ou l’on découvre la version marocaine du code de la route coincé entre les camions, la route vers Fès traverse des paysages de collines peuplés de vaches, de moutons et d’ânes et des villages où le temps semble suspendu. Puis, la médina se referme sur vous comme une main serrée. Fès est un monde clos, un dédale qui vous absorbe et vous perd avec la même générosité.

Les tanneries de Chouara, avec leurs cuves colorées, offrent un spectacle d’un autre âge : odeurs fortes d’ammoniac, gestes répétés, patience infinie des artisans. Plus loin, les médersas ouvrent des patios silencieux, incrustés de céramiques et de bois sculpté. Fès est une bibliothèque à ciel ouvert où chaque pas devient une page tournée.

Les Gorges du Toudra, cathédrales de pierre

Après avoir traversé la station aux airs de Suisse d’Ifrane, direction le Sud sur la N13 via Midelt, les paysages s’assèchent, les reliefs se forment et la route sinue entre cols et canyons gigantesques jusqu’à Errachidia ou semble commencer le désert. Avant de rejoindre Ouarzazate, je souhaite faire une pause dans les Gorges du Toudra. Là, les montagnes s’ouvrent pour laisser place à un couloir minéral que le soleil éclaire comme une nef. Les parois, hautes de plusieurs centaines de mètres, se resserrent en un passage étroit où résonnent les pas et la rumeur de la rivière, je passerai la nuit à l’Auberge Le Festival.

Ouarzazate, aux portes du désert

Au sud de l’Atlas, les paysages deviennent de plus en plus arides. Ouarzazate se dresse comme une halte, un avant-poste face au désert. Ses kasbahs de pisé semblent surgies de la terre elle-même, absorbant et restituant la lumière dans une palette infinie d’ocres et de rouges.

À Aït Ben Haddou, la cité fortifiée classée par l’UNESCO, le vent souffle entre les ruelles en terre battue. Les murs, chauffés par le soleil, gardent la mémoire des caravanes venues d’Afrique, chargées de sel et d’or.

La Vallée du Drâa, l’oasis infinie

En faisant route plus au Sud, après avoir traversé un nouveau massif lunaire fait de roche striée, vient la vallée du Drâa, longue blessure verte au cœur d’un pays minéral. Des kilomètres de palmeraies serpentent le long de l’oued, ponctuées de kasbahs qui veillent comme des sentinelles. Ici, le contraste est saisissant : le sable brûlant des montagnes s’oppose au bruissement des palmiers et à l’ombre fraîche des jardins irrigués.

La vallée raconte l’histoire des caravanes et des routes de l’or. Elle garde aussi, dans son silence, une grandeur qui échappe aux mots, toute la vallée est dominée sur un flan par des falaises d’une hauteur prodigieuse. Chaque arrêt offrait une image que je voulais fixer, comme pour prolonger l’émerveillement.

Essaouira et la côte atlantique

Pour rejoindre la côte, un très long trajet me refait passer par Marrakech, après les pistes et les vallées, la route bascule vers l’océan. Essaouira se livre d’abord par son vent, constant, puis par ses remparts blanchis à la chaux et ses portes bleues battues par le sel. Le port grouille de pêcheurs et de goélands, théâtre d’un ballet millénaire entre l’homme et la mer.

Au coucher du soleil, l’Atlantique devient un miroir mouvant, argenté et changeant. La ville, avec son atmosphère bohème, invite à ralentir. On s’y attarde, porté par le rythme des vagues et des ruelles paisibles. Mes photos en noir et blanc s’y sont teintes d’une certaine mélancolie, comme si la mer avait poli les contrastes.

Conseils pratiques pour réussir son road trip au Maroc

  • Location de voiture : la Dacia Logan, la nouvelle 4L, modeste mais robuste, reste une alliée fiable pour les routes et pistes marocaines.

  • Durée idéale : 12 à 15 jours permettent d’apprécier l’itinéraire sans se presser.

  • Meilleure saison : printemps et automne offrent un équilibre parfait entre chaleur et fraîcheur, bien qu’au printemps les paysages doivent être moins arrides et les sommets de l’Atlas peuvent encore être enneigés pour plus de varietés.

  • Hébergement : optez pour les riads au cœur des médinas, ou pour les auberges familiales dans les vallées et près des gorges.

Un pays aux mille visages

Ce voyage fut une traversée des contrastes : la densité de Marrakech, la mémoire de Fès, la majesté des Gorges du Toudra, la lumière d’Ouarzazate, la verdure du Drâa et enfin, l’apaisement d’Essaouira. Le Maroc est un pays de passages : entre montagnes et mer, entre désert et oasis, entre mémoire et présent.

Mes photographies argentiques en noir et blanc en sont le témoignage imparfait : elles disent la rudesse et la douceur, le silence et le tumulte, la beauté brute de ce pays dont les routes sont autant d’horizons intérieurs.

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